Collège Lestonnac du groupe scolaire Chevreul Lestonnac – Lyon

Collège Lestonnac, groupe scolaire Chevreul Lestonnac à Lyon

Le Groupe scolaire Chevreul Lestonnac à Lyon est un établissement d’environ 2300 élèves regroupant
4 unités pédagogiques situés sur 4 sites géographiques différents :

  • Lyon 7ème : école Lestonnac, collège Lestonnac, lycée général et technologique Chevreul Lestonnac
  • Lyon 2ème : collège Chevreul
  • Lyon 1er : Campus SupAlta, enseignement supérieur (BTS)
  • Saint Didier au Mont d’Or : lycée Chevreul Saint Didier, annexe du lycée général.

L’accueil de tous est une des caractéristiques de notre projet d’établissement. Pour ce mois-ci, nous vous proposons de découvrir le collège Lestonnac (490 élèves) à travers deux originalités : une structure unique dans notre réseau d’établissements : l’UPE2A ; et la classe flexible…

Logo UPE2A du Collège Lestonnac à Lyon

Le dispositif UPE2A au collège Lestonnac

INTERVIEW de Charlotte Antoine, professeur de Français, référente de l’UPE2A, formée à l’enseignement du FLE (Français Langue étrangère)

Que veut dire UPE2A ?

UPE2A = Unité pédagogique pour élèves allophones arrivants.

Qui est concerné par ce dispositif ?

Tous les élèves, professeurs et éducateurs du collège sont touchés par sa mise en place, car c’est bien un dispositif d’inclusion, non pas une classe… Il s’agit d’accueillir des élèves étrangers, allophones, ne parlant parfois pas un mot de français, de la 6ème à la 3ème.

Les élèves accueillis sont très motivés et vivent pour la plupart des situations sociales compliquées : des enfants qui suivent la migration de leurs parents, des expatriés mais également des jeunes en foyers demandeurs d’asile, des mineurs non accompagnés, des enfants arrivant de pays en conflits tels que l’Ukraine, l’Afghanistan, la RDC et ayant
ou non une culture scolaire. Tous ont en commun le désir d’apprendre et de s’intégrer dans le pays qui les accueille, grâce au collège, en apprenant d’abord le français.

L’objectif ultime est de pouvoir s’inscrire dans le circuit de scolarisation « classique ». Selon les profils, ils sont plus ou moins pris en charge en fonction de leur situation financière par le groupe scolaire : l’établissement a fait le choix de la gratuité pour les mineurs isolés, tutorés par la MEOMIE de Lyon (Mission Évaluation et Orientation
Mineurs Isolés Étrangers), compensée par un fonds de solidarité abondé par des donateurs (https://www.chevreullestonnac.fr/actions-de-solidarite/).

Dans notre collège, les pays d’origine des élèves sont l’Irlande, la Suède, l’Ukraine, l’Inde, l’Afghanistan, la RDC (République Démocratique du Congo), la Guinée Conakry, la Sierra Leone, la Gambie, la Tunisie, l’Algérie, la Côte d’Ivoire, le Cameroun.

Combien d’élèves sont accueillis ?

UPE2A du Collège Lestonnac à Lyon

18 jeunes sont actuellement scolarisés en UPE2A. Ils apprennent le français de façon intensive tout en étant intégrés dans des classes
ordinaires correspondant à leur âge avec un emploi du temps
personnalisé.

Quatre autres jeunes anciennement scolarisés dans le dispositif suivent des cours de soutien en FLE (Français Langue Étrangère) afin de gagner encore en autonomie en langue française.

Comment le dispositif s’articule t’il au collège ?

La mise en place de l’UPE2A est progressive depuis 2020. Le dispositif concerne des élèves de la 6ème à la 3ème ayant parfois été mal ou peu scolarisés dans leur pays d’origine.

A son arrivée, et pendant un an, le jeune prend le statut d’EANA (élève allophone nouvellement arrivé). Il est considéré comme un EABEP (élève à besoins éducatifs particuliers).

Après un test de positionnement du CASNAV afin de connaître son niveau en mathématiques, lecture, compréhension en langue d’origine, Français et
Anglais, et selon son âge, il est rattaché à une classe ordinaire.

Nous étudions au cas par cas la possibilité d’un élève à suivre les matières proposées pour son niveau et pour son âge.

Que deviennent ces élèves ensuite ?

Un des objectifs est de permettre à ces élèves de passer le CFG (Certificat de Formation Générale), le premier diplôme de l’Education Nationale français, qui certifie l’acquisition de connaissances générales de base et de capacité d’insertion sociale et professionnelle.

Avec 2 années de recul, nous comptons déjà des anciens élèves qui ont réussi à intégrer un CAP menuiserie ou électricité. Objectif atteint !

Les élèves préparent également le DELF (Diplôme d’Études en Langue Française), unique diplôme de Français Langue Étrangère délivré par le Ministère français de l’Éducation Nationale.

Ce diplôme permet de valider officiellement l’apprentissage de la langue française et bénéficie d’une reconnaissance internationale.

Le DELF valorise les compétences dans la langue française à des fins
personnelles ou professionnelles, et permet d’obtenir un emploi plus facilement dans une entreprise où la langue parlée est le français. Le DELF évalue des compétences à communiquer.

Certains d’entre eux sont aussi inscrits et préparés au DNB.

Pouvez-vous nous présenter quelques élèves ?

L’hétérogénéité est la modalité principale en UPE2A. Il y a autant de profils distincts que d’histoires, de cultures, d’origines… Pour bien comprendre quel accueil réserve ce dispositif, voici les témoignages illustrant la diversité des parcours de vie :

De l’Afrique de l’Ouest au collège Lestonnac

Après le décès de mon père, je vivais avec ma mère, mon grand-père et ma grande sœur en harmonie. Un dimanche, tout a basculé… Mon meilleur ami disparaît alors que nous étions ensemble au bord de l’eau pour une baignade ; son cadavre est retrouvé le lendemain.

Une enquête révèle qu’il s’agit bien d’un accident. Cependant, tout le monde n’était pas d’accord avec ce verdict. J’ai reçu de très sérieuses menaces de mort anonymes qui m’ont poussé à fuir d’abord dans une autre région dans ma famille éloignée, puis beaucoup plus loin… J’ai été obligé de quitter mon pays sans en informer ma famille pour la préserver.

J’ai traversé des régions et des pays dangereux, puis la Méditerranée dans d’horribles conditions, dans un canoé en caoutchouc. De pays en pays, je suis arrivé en France dans le sud, puis à Lyon en mars 2021. Mes premiers jours ont été très difficiles car je dormais dans la rue.

Un jour une dame m’a conduit dans un lieu où je pouvais trouver de l’aide. J’ai été pris en charge par l’assistance à l’aide à l’enfance. J’habite maintenant en collocation dans un appartement éducatif avec un autre jeune.

Actuellement je suis élève en 3ème et en UPE2A au collège Lestonnac et j’aimerais

devenir électricien. Je prépare les examens du DELF, du CFG et du DNB. L’UPE2A m’a appris à améliorer mon français écrit et oral, à mieux connaître la France, à m’intégrer, et à découvrir d’autres cultures.

Un mineur non accompagné
Aine Murphy
Aine Murphy du Collège de Lestonnac à Lyon

Aine Murphy est irlandaise, fille d’expatriés et a 16 ans : elle a connu le dispositif par le bouche-à-oreille grâce aux contacts de son père.

Heureusement car, en arrivant, « c’était difficile, même impossible de
trouver un collège pour m’accueillir ».

Arrivée en France en août 2021, elle
ne parlait en effet pas un mot de français. Aine a intégré le dispositif pour une seule année scolaire.

Ses résultats sont remarquables, d’après Charlotte Antoine, professeur de français et référente UPE2A.

Avec ses propres mots, Aine explique :

Au début, mon emploi du temps était d’abord l’apprentissage du français avec des matières comme l’EPS, les Arts Plastiques, l’Anglais, les Maths. Puis des matières ont été ajoutées au fur et à mesure que mon français s’améliorait.

Aine Murphy

Aujourd’hui, à peine quelques mois après son intégration, elle a l’emploi du temps complet d’une classe classique avec les mêmes matières que ses camarades français.

L’an prochain, elle retournera en Irlande et intègrera une classe de 1ère car
elle avait dû refaire cette 3ème pour apprendre le français.

L’UPE2A était vraiment bien, c’est bon pour apprendre le français, on ne pouvait pas toujours communiquer dans une autre langue, l’immersion était totale et je me suis vite améliorée.

Cela demande de travailler beaucoup. On a lu des histoires, partagé nos cultures, nous avons appris beaucoup de vocabulaire. Aussi, c’était très intéressant de côtoyer d’autres cultures, ça n’existe pas beaucoup en Irlande. Je vais essayer de garder contact après mon départ… Je ne sais pas si ce sera facile, mais j’aimerais bien rester en contact.

Aine Murphy

La Classe flexible au collège Lestonnac

En 6ème 5ème, au collège Lestonnac, les apprentissages prennent une tout autre forme dans une classe. Marie-Charlotte Grumel, professeur de Français, a étudié comment mettre en place cette « classe flexible » qui permet aux enfants d’apprendre autrement.

C’est d’abord un changement de posture pédagogique accompagnée d’un aménagement de l’espace d’enseignement qu’est la classe. La posture des apprenants et de l’enseignant est repensée.

Le postulat de départ est que certains élèves ont des difficultés à maintenir leur attention car ils se concentrent sur le fait de rester en place et silencieux et non pas sur l’objet du cours. L’enjeu est donc de donner la possibilité d’être pleinement dans le cours sans que les contraintes physiques ne soient problématiques.

L’élève est amené à s’interroger sur la posture physique et psychologique avec
laquelle il est le mieux pour travailler à l’instant T : assises mobiles (ballon, tabouret oscillant, coussin ergonomique), assise au sol, debout devant une table haute, travail en groupe, en individuel, en binôme, avec une aide plus individualisée du professeur.

Une connaissance d’eux-mêmes est donc nécessaire pour faire les meilleurs choix… et ce travail s’effectue tout au long de l’année. L’espace-classe permet cette mobilité avec des coins fixes repérables et structurants pour les élèves : coin bibliothèque, coin zen, bureau du professeur…

Parallèlement, l’organisation de la classe évolue selon les besoins du cours : îlots de 3, 4 ou 5, salle en U, table seule. Les élèves ont à disposition du matériel dont ils se servent en début de séance selon leur besoin.

Le but est d’accroître la concentration et que les élèves apprennent à les reconnaître, ainsi que ceux des autres : casques anti-bruit, fidgets (outil de concentration, anti-stress), etc. Il s’agit bien d’un changement de posture et non de décoration de classe.

Les cours magistraux n’existent presque plus, l’idée étant que les élèves soient le plus possible en activité. Le temps de parole du professeur en classe est volontairement très limité, permettant un suivi plus individualisé.

Bilan de cette 1ère année :

Globalement, le bilan est très positif. Les élèves ont
fait preuve d’adaptabilité et j’ai eu davantage de temps à consacrer à chacun. En revanche, j’ai été amenée à modifier en permanence mon fonctionnement pour m’adapter aux besoins des élèves et aux miens.

Le changement de posture étant conséquent et nécessitant de fait une restructuration complète des cours, la transition se fait progressivement. Tous les élèves font encore à peu près la même chose au même moment ; j’aimerais développer les activités individualisées en m’orientant peut-être vers davantage de plans de travail.

Je souhaiterais également trouver les moyens pour que les élèves arrivent à se centrer sur leurs besoins et ne restent pas en permanence avec le même groupe de travail, ce qui n’est pas simple à un âge où l’amitié prime.

Certains aménagements pratiques qui manquaient cette année vont être mis en place dès la rentrée 2022 : j’aimerais que les élèves soient responsables à tour de rôle de la répartition et de la vérification de l’état du matériel ; j’envisage un marquage au sol afin que les élèves puissent eux-mêmes facilement et rapidement réorganiser la salle selon les besoins.

La boîte aux lettres, avec des lettres-types mises à disposition des élèves pour qu’ils puissent s’exprimer de manière anonyme ou non, a été très positive : les élèves s’encouragent mutuellement, font remonter des problématiques !

De plus, les petits mots à ma destination sont une reconnaissance appréciable. Mais il est nécessaire que l’an prochain je ritualise l’ouverture de cette boîte aux lettres. Autre point d’amélioration : les règles du coin zen qui sont à définir plus clairement.

Mais j’ai adoré cette année voir certains élèves aller d’eux-mêmes prendre un temps de pause nécessaire pour eux-mêmes et lire, voire emprunter, des œuvres disponibles dans la bibliothèque de la classe, alors même qu’ils pouvaient être réticents au départ.

M.C. Grumel

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